jeudi 27 octobre 2011

Elections générales de 2012 :

Elections générales de 2012 :
ATT maitre du jeu jusqu’au bout ?

En politique, disait Machiavel Nicholas « le choix est rarement entre le bien et le mal, mais entre le pire et le moindre mal » Essayons d’examiner de plus prés cette assertion dans le contexte des préparations des élections générales de 2012.
On le sait, les dates des élections générales de 2012 sont connues depuis ce mercredi 19 octobre 2011. On sait aussi que Koulouba tient à son referendum, et en a décidé de le coupler au premier tour de la Présidentielle. Pour quelles raisons ? Depuis les jardins verdoyants de koulouba l’on murmure que c’est pour réduire la facture budgétaire qui s’annonçait très salée dans la loi des finances déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale. Faut-il croire au Gouvernement? Ou faut-il voir dans cette décision une ruse du Général Président ATT pour rester maitre du jeu jusqu’au bout ?
Mon propos n’est pas de reprendre ici les arguments des opposants aux reformes constitutionnelles, mais de susciter le débat autour de la dérive que pourrait découler de la décision de coupler le referendum à la Présidentielle. Le citoyen malien de Haïti que je suis, même loin des intrigues politiciennes qui se profilent au bord du Djoliba, s’étonne de l’attitude du pouvoir qui tient vaille que vaille à son projet.
Je paierais une fortune à un « buveur de sauce » de Koulouba pour savoir ce qui fait tant courir notre grand champion de la gestion consensuelle sur le chemin du referendum. J’aurai aussi aimé être dans les secrets de Koulouba pour élucider cette autre question qui me taraude l’esprit : pourquoi ATT a t-il décidé d’organiser son « referendum » le jour des élections présidentielles ? Voudrait-il brouiller la campagne des présidentielles à son profit, j’allais dire au profit de son candidat?
Là est selon moi, tout l’enjeu du referendum.
Une semaine après l’annonce, les états-majors politiques restent muets sur la question. Pris de court par le stratège ATT, les futurs candidats à la Présidentielle sont face à un dilemme cornélien : se contraindre au silence pour ne pas se mettre dos contre le maitre du jeu, ou dénoncer la décision. L’élève et le successeur de Alpha Oumar konaré, a certainement étudié Winston Churchill qui disait que  « La politique ne consiste pas à faire taire les problèmes, mais à faire taire ceux qui les posent »
Les prochains jours nous édifieront si le General politicien gagnera la bataille faute de combattants en faisant taire tous ses adversaires politiques comme il a magistralement su le faire jusqu’à présent.
Pour le moment seul le Professeur Ali Nouhoun Diallo, mastodonte de ce qui reste du mouvement démocratique et défenseur farouche du Candidat officiel de l’ADEMA ne s’est fait pas dorloter.  Dans une récente interview accordée à un journal de la place, le Professeur doute qu’ATT ne veuille confisquer le pouvoir en créant un chaos post électoral pour y rester. Parole d’un politicien avisé, habitué aux coulisses et aux délices du pouvoir à prendre au sérieux.  Contrairement au Professeur à qui je voue respect et considération pour son engagement et son courage politique, je pense qu’ATT, suffisamment rusé et intelligent, partira non sans influencer le choix de son successeur.  Pour le réussir, il descendra comme  tous les candidats à la présidentielle dans l’arène de la campagne électorale pour, d’une part, défendre le « vote utile » au referendum, et d’autres parts, donner des consignes de vote pour son successeur. Déjà , il peut et sait compter sur ses chevaux de Troie qu’est le PDES. Le parti, j’allais dire, le club de hauts fonctionnaires de l’Etat dévoués dans leur âme et chair à sa cause. On peut comprendre aisément pourquoi « l’enfant béni » de la République, Diane Semega et ses amis Ministres PDES bénéficiant de la magnanimité d’ATT, rendront la vie difficile à Jeamille Bittar, la brebis galeuse qui veut s’égarer de l’enclos de Soudh baba. Le couplage referendum - présidentielle est une occasion de rêve pour ATT de focaliser la campagne sur sa personne, car pour la cause, il aura de son coté toutes les ressources matérielles et humaines du PDES.
Pour gagner la bataille du referendum, le maitre de Koulouba peut aussi compter sur les serviteurs de l’Etat, les « baba commandant » qui  lui sont redevables et qui auront à cœur de lui prouver en retour leur reconnaissance. Il est utile de rappeler à ce sujet les primes importantes et véhicules tout terrain octroyés généreusement par le père de la Nation à ces administrateurs infatigables ou encore le bonus retraite accordé à certains agents des forces armées et de sécurité pour « services à rendre ».
Il va s’en dire que les consignes de vote du bienfaiteur ATT pour le referendum seront suivis à la lettre et par conséquent brouilleront les cartes des candidats à l’élection présidentielle. Ceux-ci seront avalés par la machine de guerre électorale du General et n’auront qu’à attendre le verdict du vote d’ATT.
Le risque est grand de voir les maliens choisir leur futur Président sur la base d’une campagne qui sera menée de bout en bout par ATT. Avec le couplage du referendum aux présidentielles, le doute n’est plus permis sur les véritables intentions du maitre de jeu de Koulouba : assurer une retraite paisible dans son champ à Mopti comme son prédécesseur Alpha qui se la coule en toute quiétude au bord du Djoliba à Souleymanbougou. Pas besoin de porter des loupes pour voir le portrait robot de son successeur : « ni vu, ni su ni entendu ».
Sans faire l’insulte aux électeurs et aux futurs candidats, je dirai que les carottes sont presque cuites. Si l’aventure venait à se réaliser, c’est une ère de dynastie de relayeurs relayés qui commence au Mali.  Pourrions-nous éviter l’instauration d’une telle dynastie après vingt années d’une démocratie balbutiante? Oui me diriez vous en allant voter le jour J. mais c’est tout ce qui se fait depuis 1992. Peut-on utiliser le vote qui est incontestablement une arme redoutable dans les mains des électeurs, comme une arme de sanction ou de récompense?
Nul besoin d’être «soma » politique pour envisager une victoire du General Président au referendum... Et à la présidentielle du 29 avril 2011, si rien n’est fait pour empêcher le couplage. Il urge pendant qu’il ne soit trop tard de trouver les moyens légaux qui annuleraient ce couplage referendum-présidentielles.  L’heure doit être à l’unité d’actions pour dénoncer dans des campagnes de sensibilisation et d’information d’envergure nationale les dérives d’une telle aventure. Et c’est à ce niveau que le rôle des citoyens est prépondérant pour faire barrage à ce qui peut déjà être considéré comme un hold-up électoral au soir du 29 avril prochain, car comme écrivait Montesquieu dans « Esprit des Lois » « Une chose n’est pas juste parce qu’elle est loi, mais elle doit être loi parce qu’elle est juste ». 


Port-Au Prince, le 26 Octobre 2011

Yachim MAIGA


vendredi 21 octobre 2011

Prolifération des mouvements de libération de l’Azawad :

Depuis la chute du régime du guide libyen Kadhafi, il ne se passe pas un jour sans que les medias ne relaient le retour « au bercail » de groupes de combattants pro-Kadhafi dans le Nord Mali.  Des informations qui soulèvent la sempiternelle question : le retour des combattants libyens d’origine malienne constitue t-il une menace pour la paix et la stabilité pour le pays ? Chacun y va de son commentaire, les experts occidentaux du Nord Mali ne se font pas prier pour étayer les scenarii possibles, mais du coté de nos autorités c’est le silence radio.
Comme dans l’affaire du cargo de la drogue, le Gouvernement d’ATT s’est une fois de plus illustré par son refus de communication. Un  mutisme qui entretient les rumeurs les plus folles et qui en dit long sur la capacité des autorités maliennes à apporter des réponses apaisantes à une population déboussolée.
La nature ayant horreur du vide, en absence de communication gouvernementale, des mouvements pour l’indépendance de l’Azawad naissent comme des champignons et occupent le terrain.    
Tous les ingrédients d’une escalade aux conséquences incalculables sont réunis :
Des combattants libyens qui débarquent avec armes lourdes et bagages sur un territoire laissé vacant  par le défunt Bahanga et que l’Etat n’a jamais pu contrôler,
Un réseau de  trafic de drogues, des mouvements pour l’autonomie de l’Azawad aux élans séparatistes, qui ne manquent aucune occasion pour se faire entendre afin de se rendre incontournables au moment opportun.
Faut-il craindre le pire, c'est-à-dire le retour des vieux démons de la rébellion. Dans une de nos publications, parue dans le journal Indépendant du 9 Novembre 2010, nous écrivions déjà « Mouvement National de l'Azawad : Est-ce le début du recommencement ? ».
Aujourd’hui plus qu’hier, le doute n’est plus de mise sur les intentions réelles du Mouvement National de l’Azawad (MNA) et des autres mouvements qui s’activent au nord au nez et à la barbe des services de sécurité et de défense du Mali. 
En effet, le MNA vient de publier le 16 octobre 2011 sur son site  http://www.mnamov.net , un communiqué dans lequel il revendique l’autonomie de l’Azawad à travers la fusion du MNA et du mouvement du défunt rebelle Bahanga : « … Les parties présentes (Mouvement National de l’Azawad (MNA) et le Mouvement Touareg du Nord Mali (MTNM) dirigé par le défunt Ibrahim Ag Bahanga et d’autres responsables militaires et politiques de l’Azawad)  ont convenu d’un commun accord de dépasser les difficultés pour asseoir les revendications politiques communes qui prennent en compte les aspirations profondes du peuple de l’Azawad… »
Plus loin on peut encore lire dans le communiqué : « les parties présentes ont décidé de se fusionner et de créer une nouvelle organisation politique dénommée : Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA) à la place du Mouvement National de l’Azawad (M-N-A)… »
Le MNA termine par un appel à faire  « sortir le peuple de l’Azawad de l’occupation illégale du territoire azawadien par le Mali... »

Dans un autre communiqué posté le 4 octobre 2011, le Mouvement National de l’Azawad, « …réitère  son  appel au gouvernement du Mali afin de répondre à ses exigences dans un délai d’un mois à compter  du 5 Octobre 2011. Au delà de cette date, le M.N.A se donne le droit d’utiliser tous les moyens nécessaires à l’instauration du droit à l’autodétermination du peuple de l’Azawad »
Y a-t-il péril en la demeure ou serait-ce seulement de la surenchère ? Car cette pratique est devenue monnaie dans la zone.
Certes les données géopolitiques ont changé. Kadhafi le protecteur, le père adoptif, le généreux donateur n’est plus là pour leur accorder le repli tactique sur la Lybie, mais la situation de confusion totale dans la zone n’augure rien de bon.
Un autre mouvement, le Front Démocratique pour l'Autonomie Politique de l'Azawad (FDAPA) s’autoproclame sur le site de kidal Info ce jour 18 octobre 2011, comme  le seul interlocuteur dans la recherche de solutions politiques et consensuelles pour une paix durable dans la zone de l'Azawad. Dans la  même déclaration, le FDAPA annonce  l’arrivée de combattants de l’ancienne 34ème division de Bani Walid dirigée par le colonel Ag Amakadaye.
Une manière à peine voilée d’avertir qui de droit, que la gestion de ces combattants déserteurs ne se fera pas sans leur aval.
Un troisième mouvement, le Front Patriotique Arabe de l'Azawad – FPAA s’est fait aussi connaitre sur le site de Kidal info de ce jour 18 octobre 2011 dans un communiqué va t-en guerre.
Tous les trois mouvements qui se pré-positionnent dans l’Azawad ont un point en commun : tous militent pour l’autonomie de l’Azawad en profitant du retour massif des combattants pour asseoir une branche militaire.
Même si l’histoire ne bégaie pas encore au Nord Mali c’est tout comme si.
En 1990 le vent de la démocratie qui a déferlé sur Bamako et qui a fini par emporter Moussa Traoré et son régime, était le pain béni pour les mouvements de l’Azawad.  
En 2011, la présence incontrôlée des combattants armés pourrait être le lait de chameau nourricier pour les mouvements autonomistes en mal de légitimité et de repère pour forcer une énième rébellion.
Sur le terrain, chacun tente d’attirer sur lui la sympathie des nouveaux arrivants en les faisant miroiter le bonheur d’avoir un Azawad indépendant, où ils joueront un rôle crucial. Nous reconnaissons que c’est tentant car quelque part en Afrique, d’autres combattants ont fini par obtenir leur indépendance avec la complicité active de ceux qui font et défont  la carte du monde.
Avec un arsenal de guerre à leur portée et jouant sur les rivalités tribales ; ces mouvements d’auto- détermination de l’Azawad constituent un danger quotidien pour les communautés du nord et pour la stabilité du pays entier.
Les conséquences sont déjà perceptibles sur le terrain : vols de véhicules, braquages et destruction de biens de jours comme de nuits avec son cortège de morts civils et militaires. Les auteurs de ces actes répréhensibles sous d’autres cieux ne sont ni inquiétés ni poursuivis. Mieux les plus téméraires, une fois leurs butins de guerre épuisés, sont parfois récompensés par l’Etat qui les récupère dans des cabinets ministériels et même à Koulouba. Tant pis pour les « niengo » les aigris et victimes qui n’ont que leurs yeux pour pleurer.
Jusqu'à quand cela va-t-il continuer ? Jusqu’au supportable serait- on tenté de répondre. Si on n’y prend pas garde, ce pourrait être trop tard pour empêcher le scenario catastrophe, qui verrait les populations s’organiser en groupes d’auto-défense, un scenario idéal pour tous les désœuvrés qui végètent dans la nature et qui n’on rien à perdre. 
Que de tristes souvenirs quand on se rappelle de toutes les horreurs commises par les ex-groupes d’auto défense et la rébellion des années 90.
Si rien n’est fait, le nord Mali deviendrait une poudrière, un « no man’s land » où chacun gouvernerait selon sa propre loi. Aussi urge t-il pour le pouvoir de mettre très rapidement en place, une communication efficace et proactive pour informer la population afin de couper court à toutes les rumeurs et couper l’herbe sous les pieds des mouvements d’auto- détermination.   
En second lieu, le pouvoir de Koulouba ne devrait-il pas commencer à encadrer l’arrivée sur le territoire malien des combattants ? Cela soulève une autre question : ATT et son Gouvernement ont t-il les moyens de contrôler le flux migratoire dans cette partie du territoire malien? Il ne faut pas se leurrer, point besoin d’être dans le secret des services secrets maliens pour savoir que le Mali seul ne peut assurer la sécurité dans sa bande sahélo saharienne, encore moins désarmer les milliers de combattants qui vont continuer à affluer vers l’Azawad.
Serions-nous alors condamnés à vivre dans la peur, la psychose, le désordre, l’insécurité au risque de compromettre 2012, sur lequel sont rivés les yeux de nos braves hommes politiques? Pendant que la fumée couve au nord, ATT au crépuscule d’un dernier mandat, disperse son temps et son énergie dans des reformes institutionnelles et de préparation de fichier électoral « consensuel ».
Saurions-nous transcender nos différences pour trouver les solutions qui nous éviteraient  le retour des vieux démons de la rébellion?  
C’est le seul défi qui vaille pour ATT dans sa dernière ligne droite avant une remise hypothétique du relais à son successeur le soir du 8 juin 2012.


Port-Au Prince, le 19 Octobre 2011

Yachim MAIGA